Guerre en Ukraine - Vers la Troisième Guerre Mondiale ?

Philippe Brindet - 30.09.2025

1 - Nouvelles du front

Quelques rares contre-attaques ukrainiennes n'impliquant que quelques troupes sur moins de 5 kilomètres, tentent d'endiguer l'avance du rouleau compresseur russe. Les fronts au Nord de l'Ukraine et tout au sud, la région de Kherson, restent étrangement calme. Au "centre", les quatre régions de Zaporijzia, de Dniepropetrovsk, de Donetsk et de Lougansk sont le théâtre de violents combats et d'avancées russes rarement contrebattues par les ukrainiens.

Les Russes progressent notamment à Kupiansk, Lyman, Sieversk, Kostantynivka, Pokrovsk, au sud de Dniepropétrovsk et à l'est de l'oblast de Zaporijzia.

Des analystes comme Paul Craig Roberts estiment que Poutine a perdu la guerre en Ukraine parce qu'il n'a pas engagé les ressources suffisantes pour écraser rapidement les occidentaux.

Pour souligner la faiblesse relative des armées russes, on peut prendre le cas du saillant au Nord-Est de Pokrovsk. Il y a deux mois, les forces russes avaient menée une offensive rapide vers le nord. Ils avaient en quelques jours gagné 15 kilomètres de terrain sur 2 kilomètres de large. Une première contre-offensive ukrainienne avait échoué en août. Il y a quelques jours, les ukrainiens ont repris une nouvelle contre-offensive qui a pratiquement isolé le saillant du reste du front russe en menant une attaque par l'Ouest et une autre par l'Ouest. Les Russes auraient repris une certaine initiative sur le saillant, mais il semble que le saillant est toujours isolé et que l'effort ukrainien se poursuit.

Il semble qu'en effet les russes disposent de très peu de troupes d'assaut qui sont engagées temporairement sur un ou deux points du front. Quand le terrain est gagné, sur quelques kilomètres seulement, les troupes d'assaut sont ramenées en arrière et des troupes d'occupation du terrain les remplacent dont la valeur combattante ne serait pas très élevée. Les forces russes seraient ainsi relativement fragiles puisque les ukrainiens disposent eux-aussi de quelques troupes d'assaut dont ils évitent qu'elles entrent en contact avec leurs "homologues" russes. Utilisées contre les "territoriaux" russes, elles semblent très efficaces.

Au sujet de la question d'un échec de la stratégie de Poutine, on doit aussi tenir compte que les forces ukrainiennes sont désormais capables d'investir par drones aériens des régions russes très éloignées de la frontière russe. Il semble que la défense aérienne russe soit relativement efficace. Mais, elle serait assez facilement saturée à cause de l'ampleur du territoire russe et de la diversité des points d'attaque des ukrainiens qui semblent partir de points ukrainiens, mais aussi du Kazhakstan, des pays baltes et, depuis peu, de drones navals se rapprochant des côtes est de la Mer Noire pour lâcher des drones aériens embarqués. Les destructions des raffineries et stockage d'essence mais aussi d'usines d'armement russes sont de mieux en mieux documentées.

Les propositions de paix des russes - loin d'être claires - semblent montrer que les russes ont avalisé partiellement le fait que les buts de guerre ne seront pas atteints. Clairement, une action militaire d'ampleur comme l'"opération militaire spéciale", devait conduire à une occupation de la rive est du Dniepr de Zaporijzia à Kiev - la ville étant exclue - et une occupation de la rive sud d'Ukraine à Odessa pour rejoindre la Transnistrie. Manifestement au cours du premier semestre 2025, les russes ont assimilé qu'ils devront se contenter des 4 oblasts du Donbass et que ce serait bien le mieux.

2 - Agitations occidentales

Les Européens font des efforts exceptionnels pour contrôler la Roumanie, la Moldavie et la Géorgie, tandis que les américains font leur affaire de l'Arménie et des républiques islamiques du Sud Russie. Les occidentaux ont interdit le retour de la Russie aux affaires commerciales avec l'Europe en général, l'Allemagne en particulier.De ce point de vue, sans compter l'Ukraine, la stratégie de Poutine est un échec considérable.

Mais, il faut reconnaître que la "construction" occidentale est précaire parce qu'elle doit énormément à la propagande. A quoi sela sert-il de bourrer les urnes et d'emprisonner les opposants pour "fabriquer" artificiellement un "bloc occidental" pour "résister" aux BRICS et autres SCO ? D'autant que les menées anti-démocratiques occidentales se donnent libre cours partout en occident : aux Etats-Unis, en France (affaires judiciaires Le Pen ou Sarkozy, ...) en Allemagne (affaires policières ou judiciaires contre l'AfD et ses dirigeants), au Royaume-Uni (affaires médiatiques et policières contre les conservateurs - il ne s'agit pas des "tories" ...), ...

Les Etats-Unis et l'Europe n'ont plus d'industrie et leur système de production d'énergie est très menacé. Les vélléités de Trump aux Etats-Unis ne doivent pas faire oublier que le réseau électrique américain est en limite de rupture, tout comme la plupart de ses réseaux : communication, transports, eau, assainissement, ...Si la Russie rencontre de sérieux problèmes économiques, les occidentaux ne sont pas en reste...

Malgré cela, Trump s'est manifestement convaincu - probablement à cause d'un retour en force des néocons - que la Russie est militairement débile, industriellement arriérée et qu'à la différence, les Etats-Unis sont la première puissance militaire et industrielle du monde devant laquelle la Russie va devoir plier. Cette opinion est partagée par les "européistes" persuadés que la Russie est un nain comparé à la puissance européenne forte de ses 520 millions d'habitants ...

Ecoeuré par l'attitude paresseuse de la Russie suite à ses ouvertures d'Anchorage, Trump a commencé par s'énerver de la belliquosité des européistes Macron, Starmer, Merz et surtout Von Der Leyen. Il a donc décidé que l'Amérique en avait assez de guerroyer par ukrainiens interposés et que ce serait à l'Europe de le faire. A condition ... qu'elle achète les armes aux Etats-Unis. Etant entendu que si les européens veulent continuer à "utiliser" les ukrainiens comme soldats, lui Trump était prêt à livrer les armes achetées par les européens directement aux ukrainiens ...

On en a un peu vite tirée la conclusion que Trump se "retirait" du conflit ...

Il s'est produit alors quelques "micro-événements" dont un seul d'entre eux ne signifie rien et n'a presque aucune influence. Mais leur ensemble et leurs convergences deviennent très embêtant.

Cà a été :

  • plusieurs incursions de chasseurs russes notamment en Lithuanie ;
  • la prétendue "attaque" de drones russes sur le territoire du Sud de la Pologne ;
  • les vols de drones non identifiés au-dessus d'aéroports civils et de bases militaires, notamment au Danemark ;
  • la multiplication des vols de drones aériens ukrainiens loin dans le territoire russe avec la destruction ou l'endommagement de raffineries de pétrole et d'usines d'armement contraignant les russes à prendre des mesures passives anti-drones pour protéger certaines de leurs installations ;
  • l'accroissement des bombardements aériens russes sur toute l'Ukraine.

Pour compléter ce tableau, on doit rappeler :

  • il y a une semaine, la déclaration de Trump sur son réseau social Truth que la Russie n'était qu'un "tigre de papier" et que l'Ukraine pouvait parfaitement regagner les territoires perdus ;
  • en fin de semaine dernière, la déclaration de JD Vance, Vice-Président des USA, que les USA envisageaient de livrer des missiles longue portée Tomahawk à l'Ukraine pour bombarder la Russie et que la Russie était économiquement en ruine, qu'elle ne gagnait plus sur le champ de bataille, et qu'elle avait refusé une négociation de paix tripartite ;
  • Pete Hegseth, ministre US de la Défense, a convoqué pour le 1er octobre, tous les officiers supérieurs au Pentagone, pour faire le point sur la stratégie américaine ;
  • Des sources d'intelligence ouvertes ont analysés les plans de vol de ces derniers jours. Des vols d'une vingtaine de supertankers ou avions ravitailleurs ont été exécutés et sont en cours pour envoyer en Europe la logistique nécessaire à une opération de bombardements massifs par l'USAF.

Enfin, dernier détail le plus significatif : les européens ne sont absolument pas prêts à la moindre bataille. Depuis quelques semaines, les Etats tentent en urgence de préparer les populations à un accident majeur. Il y a trois semaines, le Ministère de la Santé français a envoyé une étude aux hôpitaux français pour les inciter à se préparer à la réception de dizaines de milliers de blessés d'un front de guerre totale. La BCE vient de recommander que les gens fassent un effort pour stocker des vivres et de l'argent liquide pour quelques jours.

Faut-il en déduire que la Troisième Guerre Mondiale va éclater en Europe ?

Liste des Sources consultées

  1. WHEN TOMAHAWK MEETS BEAR, THE HAZEL TREE (ORESHNIK) WINS, John Helmer - 30/09/25
  2. Wave Of US Air Tankers Deploy To Europe, Tyler Durden - 29/09/25
  3. Trump To Join Hegseth's Gathering Of Generals On 'How We're Doing Militarily', Tyler Durden - 29/09/25
  4. Why Is Pete Hegseth Meeting With Hundreds of Generals?, Brandon J. Weichert - 29/09/25
  5. Ukraine Takes Out Key Russian Electronics Factory in Cruise Missile Strike, MWM - 300925
  6. I Warned Putin Many Times About the Consequences of His Never-ending Ever-widening "Special Military Operation" in Ukraine |, Paul Craig Roberts - 270925
  7. Danemark : la Russie est probablement à l'origine des survols de drones, selon le premier ministre suédoi, Le Figaro avec AFP - 29/09/25
  8. Après un nouvel incident, l'Allemagne va s'autoriser à abattre des drones en cas d'intrusion sur son territoire, Le Figaro avec AFP - 27/09/25
  9. Romania Reports Russian Drone in Its Airspace, The New York Times - 140925
  10. 20 Russian Fighter Jets Enter Airspace of Estonia, a NATO Member, The New York Times - 19.09.2025
  11. Trump's Economic Team Pursues the Chimera of Collapsing the Russian Economy, Larry Johnson - 08/09/25

Revue C-Politix (c) 30 Septembre 2025