L'Occident qui ne va pas

Philippe Brindet - 24/02/2024

Deux groupes d'intellectuels s'opposent ou du moins leurs opinions sont opposées sur la question de l'Occident. Pour les uns, tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes. Pour les autres, c'est à peu près le contraire. Même si les analyses diffèrent dans chaque groupe. Et de fait,

L'Occident ne s'est jamais mieux porté

Les opinions de ce genre portent sur trois sujets essentiels :

  • l'Occident est le leader du monde qui adhère à la liberté sous toutes ses formes ;
  • l'Occident est le leader du monde économique ;
  • l'Occident est le leader du monde scientifique.

Ne partageant aucune de ces opinions, je laisse le soin à mon lecteur de rechercher leurs auteurs.

L'Occident décline, se défait, décade, ...

Les opinions de ce genre utilisent trois vocables :

  • la décadence ;
  • la défaite ;
  • le déclin.

L'analyse de décadence fait souvent référence à des auteurs du XIX° ou du début du XX° Siècles qui eux-mêmes faisaient référence à l'Histoire des civilisations du monde. Principalement deux civilisations ont disparues suite à une décadence admise par de nombreux historiens : la civilisation romaine, puis la civilisation byzantine. Cette analyse est bien connue des historiens. Elle présente des traits communs avec notre civilisation occidentale. Mais, la civilisation occidentale se défend de toute décadence et ses soutiens ne manquent pas de formules pour ridiculiser les tenants de la décadence.

L'analyse du déclin est surtout une critique interne à l'occident. Elle se fonde sur deux constats. Le premier se fonde sur l'observation des peuples et de leurs richesses. Les gens en Occident sont de plus en plus très pauvres et les gens de fortune moyenne sont eux-aussi de plus en plus pauvres. Le second constat est inverse : les mondes non occidentaux sont en croissance tandis que l'occident décroit. Plutôt que de discuter les faits qui fondent ces questions, les défenseurs de la gloire de l'occident méprisent les "déclinistes" et les fustigent à longueur de colonnes de presse.

L'analyse de la défaite est - me semble t'il - nouvelle et son auteur est l'anthropologue Emmanuel Todd. Todd émet cette opinion sur une conjecture spéciale : l'agression de la Russie à l'encontre de l'Ukraine. Que la défaite de l'Occident découlerait de l'agression russe est loin d'être établie par Todd. Il estime plutôt un ensemble de facteurs dont l'un des principaux serait la mort du protestantisme qui aurait été le moteur du progrès des Etats-Unis qui ont entraînés l'occident. La critique de l'opinion de Todd est difficile parce que Todd a prévu dès 1976 la chute de l'Union soviétique sur la base de considérations démographiques. Or Todd a eu raison malgré des critiques virulentes en 1976. Quarante ans plus tard, la critique de Todd est risquée ...

L'Occident ? Qu'est-ce qui ne va pas ?

L'observation de la vie publique conduit à plusieurs constats, contestables pour certains, partagés par d'autres.

Premier constat : l'Occident fonde sa politique, l'animation de son économie, l'orientation de sa société sur le mensonge.

Tout est mensonge. La vie démocratique est quasiment partout et toujours entièrement mensongère. Les élections suprêmes sont "forcées" sur le candidat choisi par le régime occidental et les élections démocratiques, juges, députés, ... sont organisées majoritairement par le régime occidental. Les lois ont été multipliées de sorte que leur application est devenue totalement arbitraire, une loi contredisant dix autres lois. La loi occidentale est devenue mensonge.

La presse, la culture, l'enseignement, tout y est mensonge, propagation de l'erreur et de la haine de la vérité. La réalité empêche le régime d'atteindre ses objectifs ? Pas de problème ! Il suffit de ré-écrire le réel par de l'idéologie : réchauffement climatique, épidémies, net zero, écologie, wokisme, genrisme, cancel culture, ... tout est fait pour supplanter la réalité. Or, l'ignorance abyssale qui règne dans le public occidental favorise la diffusion des idéologies. Tant que les gens n'atteindront pas un niveau suffisant de connaissances pour identifier l'idéologie destructrice du réel, il sera impossible d'envisager la moindre révolution pour sortir de la tyrannie du régime occidental.

Comme dans la fiction de Orwell, la vérité, c'est l'erreur, le bien, c'est le mal et la beauté, c'est l'horreur. Tout est mensonge.

Deuxième constat : l'Occident haït la transcendance.

Le régime occidental a mis plusieurs siècles à purger sa population asservie de toute connaissance même élémentaire de la transcendance. Le régime occidental a tout mis en oeuvre pour détruire jusqu'aux dernières traces du christianisme sur lequel l'Occident s'est fondé. On peut estimer que la dernière trace de christianisme en occident a été détruite par la Première Guerre Mondiale. C'est à cette époque que les deux confessions principales du christianisme en occident, à savoir le catholicisme et le protestantisme, ont disparues. Il subsiste encore des adaptations quasi muséales des deux confessions. Mais ces adaptations au régime occidental sont en elles-mêmes des trahisons de la transcendance rationellement connue dans la civilisation judéo-chrétienne.

Notamment en France, une conception anti-théiste de la transcendance s'est imposée dès le courant du XVIII° siècle. Cette conception s'est transformée en athéisme civilisationnel qui a produit notamment le mouvement marxiste qui a beaucoup fait pour l'établissement de l'anti-théisme. En France, l'un de ses avatars a été la laïcité qui a fait croire à une frange religieuse de la population que le christianisme serait toléré dans la sphère privée. Cette idée destructrice a perdurée jusqu'à la fin du XX° siècle. Elle a été emportée au XXI° siècle par l'implantation à la fois d'un matérialisme absurde et d'un contrôle des consciences de plus en plus obscures des individus coupés de leurs racines civilisationnelles et religieuses.

Il faudrait développer ici ces opérations terribles que même l'Union Soviétique ou la Chine maoïste n'étaient pas parvenues à mettre en place, de sorte que l'état de la religion aujourd'hui en occident est pire que celui qu'il avait à la chute du soviétisme ou à celle du maoïsme.

Or, sans parler de religion, la disparition de la moindre transcendance explique la disparition du moindre sens moral typique des élites politiques, économiques ou culturelles. Leurs membres vivent comme des porcs, agissent comme les animaux n'acceptent pas de vivre. C'est ainsi que le mensonge le plus honteux n'éveille aucun doute chez le moindre politicien. La moindre pratique économique d'aujourd'hui qu'on qualifiait de vol ou de rapine il y a quarante ans est devenue courante et admise. Le personnel culturel que ce soit chez les "artistes" ou les animateurs de "médias" expose leurs vies vicieuses sans aucun frein. Ils poussent leur dépravation jusqu'à s'accuser mutuellement de ces vices.

Troisième constat et ... suivants

Peut être n'ai-je pas le coeur assez bien accroché. Peut être un constat exhaustif des tares de l'occident exige un regard extérieur. Je renvoie à ailleurs une telle analyse.

L'Occident du mensonge et du vice face au Monde

L'Occident qui s'imagine "leader" du monde, "phare" de l'Univers, ne représente que 10% de la population mondiale. Il occupe une surface très minoritaire. Au point de vue civilisationnel, l'Occident est menacé par trois menaces extérieures, de moins en moins extérieures, d'ailleurs.

La première menace est celle de l'islam.

Et cette menace est à la fois interne - par l'immigration installée - et externe par la puissance économique de l'oumma. La destruction de l'occident par l'immigration est générale. Souvent, les français imaginent qu'ils sont le seul Etat occidental à subir cette malédiction, qui est une bénédiction pour les ennemis des français. Or, la menace est la même avec la même intensité, la même urgence partout en Occident. J'ai décrit ailleurs les modes de destruction qu'approte l'islam en occident. La forme particulière de l'insécurité sociale en Europe notamment explique facilement ce danger.

Pour faire bonne mesure, la menace islamique en Europe est en fait celle d'une invasion générale par l'Afrique en pleine révolution démographique. Et cette extension de la menace au-delà de l'islam facilite l'agression de l'islam. J'y reviendrai ailleurs. ET la menace de l'islam peut surgir avec paroxysme, n'importe quand, n'importe où en occident. Le 7 octobre 2023, en Israël ...

La deuxième menace est celle de la Russie

La Russie qui a hérité de l'Union Soviétique est passée de l'état corrompu d'une zone économique de pillage pour l'oligarchie américaine sous Eltsine - état qui s'est prolongé en Ukraine sous Biden depuis 2014 - à celui d'une puissance que les occidentaux qualifiaient il y a encore deux ans de "puissance moyenne" ... L'écrasement de l'économie occidentale suite au déclenchement par la Russie de l'opération militaire spéciale démontre que cette minoration de la puissance russe a été fatale à l'occident.

Or, la Russie de Poutine a offert aux occidentaux un partenariat dès 1999. Poutine était d'ailleurs parvenu à des coopérations amicales :

  • avec les américains : ce sont les lanceurs russes qui ravitaillaient la station spatiale internationale ;
  • avec les européens : la prospérité des trente dernières années de l'Allemagne et de ses satellites européens comme la France doit tout au prix bas de l'énergie russe.

Ces démonstrations d'"amitié" ont été rejetées avec dédain par l'Amérique qui a provoqué l'opération militaire spéciale russe en Ukraine. Stupéfaite, la vassale Europe s'est mise à japper comme un roquet contre l'ours russe ...

Il s'est donc installé entre l'occident et la Russie une animosité d'autant plus importante que la réaction stupide de l'occident - des américains dirigés par le sénile Biden - a causé des dommages importants à la Russie. Des dizaines de milliers de morts, une économie florissante obligée de se muer en économie de guerre, des partenariats de la Russie avec le monde entier soumis aux aléas de la fortune de la guerre. Mais, par dessus tout, la démonstration par l'absurde d'une simple hypothèse : l'occident n'a pas la puissance avec laquelle les américains jouent la géopolitique. L'occident n'a pas de puissance militaire, n'a pas de puissance industrielle, n'a pas de puissance diplomatique.

La situation actuelle conduit nécessairement la Russie à accroître sa virulence à l'égard de l'Amérique et de ses vassaux. La Russie y est contrainte pour sauvegarder ses relations avec le reste du monde dont, quoi qu'il en pèse aux occidentaux pour l'admettre, la Russie devient une sorte de leader d'influence.

La troisième menace est celle de la Chine

La Chine est connue des occidentaux pour fomenter des troubles guerriers avec une petite île du Pacifique, totalement inconnue pour la plupart des occidentaux. Il s'agit de Formose. Appartenant à la Chine continentale, sans y appartenir, indépendante sans avoir de reconnaissance internationale, devant à terme - quand on ne sait - se rattacher à la Chine continentale, Taïwan est une sorte de chiffon rouge qui exaspère la stupide vachette qu'est l'occident dans l'arène des passions des Etats. La Chine est bien plus puissante que l'Etat qui rugit périodiquement en affirmant sa souveraineté sur l'île sans faire autre chose que des défilés militaires sur les côtes de Taïwan.

L'influence de la Chine en occident est énorme. La géopolitique de la Chine multimillénaire repose sur la ruse et la corruption. Cela "tombe" bien, l'occident est corrompu. Les agents d'influence chinois travaillent le coeur de l'Amérique. Les chinois corrompent tout : politiciens, comme Biden, industriels comme Gates, journalistes, universitaires .... Tout leur est bon. La corruption chinoise est un facteur de dégradation de l'occident encore peu connu. De l'occident du moins.

Mais, la Chine est aussi menaçante par ses alliances que sa puissance lui permet de retourner à tout instant. Aujourd'hui, elle est alliée de la Russie sans être adversaire des Etats-Unis. Elle est aussi alliée de l'Iran et de l'Arabie, parce que la Chine a compris la toxicité de l'islam à l'encontre de l'occident, ...

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Conclure ? L'occident va mal. Mais il peut traîner comme un grabataire pendant longtemps, égrotant sans conscience de sa fin. Pourtant le devoir humain des occidentaux est de lutter contre le mensonge, de défendre la vérité, le bien et le beau. Les occidentaux doivent ensuite écarter du pouvoir leurs élites. Enfin, seulement, les occidentaux pourraient lutter contre les menaces. Il n'est pas nécessaire d'espérer pour entreprendre, mais de persévérer pour réussir.


Revue C-Politix (c) 24 Février 2024