Le choc des civilisations pour les uns, la fin de l'histoire pour le dernier

Philippe Brindet - 11 Octobre 2022

La narration des média occidentale, fidèle aux instructions des services spéciaux américains, consiste à expliquer l'affaire ukrainienne comme un délire qui aurait saisi un dictateur de la pire espèce, Poutine. Même les plus corrompus des occidentaux savent que c'est faux. Mais personne n'ose aller contre cette "narration". Elle explique tout, c'est-à-dire rien. Et comme le public occidental ne comprend jamais rien à tout, tout le monde ... reste indifférent.

La narration russe est bien différente. Elle a été exposée par deux discours de Poutine, le premier au départ de l'opération militaire spéciale le 24 Février 2022 et le second le 30 Septembre 2022 au départ de la campagne de mobilisation partielle. Peu d'analystes ont "condescendus" à lire ces discours. D'un certain côté, ils ont raison. Les raisons de Poutine n'ont rien à voir avec celles des Occidentaux et les analystes occidentaux seraient plus embarrassés par les raisons de Poutine si ils les connaissaient.

Mais aujourd'hui, nous ignorons la date de la fin de l'Histoire pour nous. Nous savons seulement qu'elle est proche. Peut être a t'elle déjà sonné.

La guerre en Ukraine sert les intérêts des Etats-Unis, comme puissance dominante du XX° siècle

Il faut bien comprendre une chose : l'Ukraine ne présente aucun intérêt en soi pour les Etats-Unis. L'Ukraine est une zone économique qui sert seulement de terrain de chasse à la corruption américaine. Biden, depuis qu'il était Vive-Président des Etats-Unis en 2014 y a table ouverte. Et il est loin d'y être seul. Des allemands, des anglais s'y trouvent. Des Géorgiens, des israéliens et des arabes aussi. Des Turcs. C'est la plaque tournante de la corruption.

Au point de vue économique, l'Ukraine est l'un des pays les plus pauvres de la planète. Il n'enrichit que la corruption. 40% des terres agricoles ont été "vendues" à des hommes d'affaire américain, dont Bill Gates. C'est tout. Le reste revient sur des comptes bancaires dans le Delaware. Chez Joe Biden. Non, Les Etats-Unis ne sont pas prêts à "mourir" pour la démocratie en Ukraine.

Par contre, la guerre en Ukraine permet aux Etats-Unis d'engager les Etats européens dans un processus de décadence économique. Le récent sabotage des gazoducs russes Nordstream n'est que l'un des actes de destruction de l'économie de la zone européenne. Servis par l'exceptionnelle corruption des politiciens et des milieux d'affaire européens, les Etats-Unis ont décidé depuis longtemps d'éteindre la puissance économique européenne.

La mondialisation a permis de ruiner l'industrie et l'agriculture européennes en emportant les actifs vers la Chine et d'autres Etats que les Etats-Unis "imaginaient" à leur merci. Puis, les folies idéologiques de la décroissance, du réchauffement climatique, de l'épidémie de SARS-CoV-2, issus des think tank et universités américaines, ont fait franchir un degré supplémentaire à l'action destructrice des Etats-Unis à l'encontre de la zone européenne. Enfin, la guerre en Ukraine interdit pour longtemps toute compétition de la zone européenne avec les USA, puisque l'Europe ne peut plus exister sans l'énergie et les matières premières russes qui leur sont aujourd'hui coupées.

Nous sommes aujourd'hui à un moment clé que nous ne contrôlons absolument pas : notre système économique, social et politique va s'effondrer sous son propre poids. D'un seul coup. Dans une anarchie imprévisible.

Voilà le but stratégique des Etats-Unis : ruiner définitivement la zone européenne, la transformant en zone d'accueil des excès démographiques de l'Afrique.

La guerre en Ukraine sert les intérêts de la Russie, comme bloc de civilisation destiné à coopérer dans le XXI° siècle

Très certainement, la Russie a supporté les affronts de la France et de l'Allemagne qui ont refusé de réaliser le contrôle des Accords de Minsk. La Russie a supporté les avanies des Britanniques qui ont tout fait pour assister l'Amérique dans la déstabilisation de l'Ukraine et sa possible annexion par l'OTAN. Cette patience s'explique seulement parce que la Russie voulait commercer et même coopérer avec l'Europe, l'Allemagne d'abord. L'Allemagne a bénéficié de gaz et de pétrole à des prix bas qui ont sauvé sa marge commerciale dans sa production industrielle. D'où provient son "succès" économique dans l'Europe.

Mais les Etats-Unis assistés de la Grande-Bretagne ont armé l'Ukraine, la préparant à son i,ntégration europénne et otanienne. La Russie a alors compris que la zone européenne ne comprenait pas l'alliance civilisationnelle que lui offrait la Russie, aspirée par ses relations avec la Chine et l'Inde. La Russie avait pourtant besoin d'équilibrer ses relations asiatiques par des relations avec l'Europe. Et avec l'Amérique. Mais l'Amérique ne voulait aucunement de ces coopérations. Les grandes manoeuvres en Biélorussie de 2021 étaient seulement faites pour permettre aux Européens de faire un geste d'apaisement vers Moscou. Ce geste n'a pas été possible probablement à cause des Britanniques, vassaux des Américains. La guerre était inévitable.

Mais même cette guerre est anormale. Au lieu de tenter de détruire son adversaire, la Russie a surtout cherché à protéger ses "amis" : les russophones de l'Est de l'Ukraine, en faisant semblant d'abord de ne pas voir son ennemi ukrainien, puis de ne pas voir la collusion des Etats-Unis et de l'Otan avec Zelenski.

Dans son deuxième discours du 30 Septembre 2022, Poutine a expliqué qu'il avait compris que son offre d'alliance civisationnelle à l'Europe avait été définitivement rejeté. La Russie joue maintenant la convergence avec les buts géostratégiques de l'Amérique : détruire l'Europe d'abord et finir par la destruction de l'Amérique. Probablement pas par la seule guerre, mais par le blocage des économies occidentales.

Plus la guerre en Ukraine s'amplifie, tout en durant, la destruction économique de l'Europe est assurée par elle-même et par les menées de son suzerain américain. Il suffit pour la Russie de doser habilement ses actions militaires : détruire suffisamment de l'Ukraine et de l'Otan pour limiter ou faire reculer l'ennemi, mais pas trop pour obliger la zone européenne à prolonger et agraver son régime de sanctions.

Revue C-Politix (c) 11 Octobre 2022