Le débat Mélanchon - Zemmour de Septembre

Philippe Brindet - 24 Septembre 2021

A l'ouverture du débat Mélanchon-Zemmour

Sur la chaîne de télévision privée BFMTV, pratiquement entièrement acquise au gouvernement macronien, Eric Zemmour, le probable candidat sans parti à l'élection présidentielle de 2022, rencontrait Jean-Luc Mélanchon, candidat des vestiges du gauchisme politique des années 80, vaguement reconverti dans l'islamophilie terroriste et l'écologisme béat.

La position débattue par Mélanchon

Mélanchon, est venu dans le débat avec Zemmour avec un sentiment primaire : le dégoût radical des "idées" de Zemmour, islamophobe notoire, condamné par les tribunaux. Cette dernière notation, Mélanchon s'est abstenu de la citer plus d'une fois, parce que Zemmour lui a rétorqué ses propres condamnations pour outrage. Mélanchon a tenté de se divertir en qualifiant ses actes de rebellion citoyenne et est prudemment passé à autre chose.

Mélanchon a de fait peu parlé de son programme. Mais il a surtout agressé Zemmour, le traitant d'ignorant et de "petit homme". Zemmour s'est rebellé, mais s'est abstenu assez vite de se laisser emporter dans une querelle de cours de récréation. L'autre domaine traité par Mélanchon a été la description "poétique" qu'il a faite de son idéologie et de celle de ses camarades. Un mélange de républicanisme religieux, faisant penser à celui de l'abbé Grégoire , la référence répétée à la Sainte Révolution de 1789 , l'invocation de la créolisation d'Edouard Glissant - auteur martiniquais vaguement connu des gauchistes sexagénaires et totalement inconnu de la majorité des français - pour s'opposer à l'"anti-immigrationisme" de Zemmour. Mélanchon s'est ensuite vaguement lancé contre la police française qui "éborgne 37 citoyens", mais de manière si vague que la réplique de Zemmour l'a conduit à changer de sujet. Il a enfin un peu développé sa conception de l'écologisme béat. Il ne démantèle pas le nucléaire, chance de la France pour Zemmour, mais il aménage sa sortie. La différence échappe à Zemmour et Mélanchon ne juge pas utile d'expliquer la nuance.

Mélanchon développe son idéologie de la décroissance centrée sur le développement durable. Il aurait voulu éviter les sujets dangereux mais est contraint de s'engager en faveur des éoliennes que Zemmour accuse de polluer le paysage, la santé des voisins, la pollution par les ruines des pales en carbone et des monstrueux socles en béton, ... Il évoque vaguement les lendemains enchanteurs de la solidarité et de la fraternité, s'attirant les sacarsmes de Zemmour.

La position débattue par Zemmour

Zemmour porte les idées de la majorité des français : le problème central de la France, c'est l'immigration qu'elle soit clandestine ou légale. Mais Zemmour, même s'il cultive cette tendance majoritaire jusqu'à l'obsession a parfaitement vu d'autres problèmes : la trahison républicaine des juges, notamment ceux des institutions internationales, la dépendance de la France à des traités qu'il faut dénoncer à chaque fois qu'ils sont en contradiction avec les intérêts de la France, mais aussi l'écologisme béat ravageur d'un Mélanchon ou des "Verts".

Même s'il se rebellait contre l'écologisme "béat" de Mélanchon, Zemmour a fait un plaidoyer majeur de l'électricité nuclaire, niant qu'il pose des problèmes comme ceux de Tchernobyl ou de Fukushima. Il a estimait que l'électricité nucléaire, même s'il fallait acheter l'uranium à l'extérieur, était une chance pour la France parce qu'il s'agissait d'une technologie française. Il n'a pas convaincu Mélanchon, mais il est certain que c'est un point étranger à son obsession de l'immigration, et qui enrichit son attractivité auprès des électeurs. Grâce à sa sortie du le nucléaire, Zemmour a démontré qu'il était capable de traiter de questions pratiques, et de manière réaliste et non idéologique.

Ce sont les points que Zemmour, aidé par Mélanchon à son corps défendant, est parvenu à développer. Souvent, Zemmour leur ajoute la domination idéologique des minorités perverses. Il ne l'a pas fait ici.

Le rôle indécis des journalistes dans le débat Zemmour-Mélanchon

Un couple de journalistes gominé pour l'un, dépoitraillée pour l'autre, assurait la direction du débat. Ils ont essayé de prendre la direction du débat. Mais même Mélanchon les a renvoyé dans les coulisses et comme Zemmour, a refusé de répondre à leurs questions, parce que Zemmour et Mélanchon débattaient entre eux, pas avec les journalistes. Les deux malheureux se sont alors bornés à surveiller l'égalité du temps de parole et de convaincre les débatteurs de changer de partie programmée du débat quand c'était le moment.

Il est étrange qu'ils se soient soumis aux débatteurs. Manque d'envergure ? C'est possible. On peut estimer qu'ils ont obéi aux ordres de BFMTV de laisser Mélanchon "massacrer" Zemmour. Peut être aussi de se réserver pour l'époque peut être prochaine où Zemmour sera vraiment candidat.

Le couple de journalistes a été complété par une équipe de 10 journalistes "fact-checkers" qui étaient chargés de vérifier les chiffres que les débatteurs allaient se lancer à la tête. La bêtise du "fact-checking" tient toujours à l'imbécilité produite par quarante ans d'instruction bâclée qui a perverti les esprits sur ce qu'est un "fait incontestable". Pour le moindre "intello", un chiffre est un fait incontestable. Et le sommet de l'incontestabilité se trouve dans les chiffres du "gouvernement". Ainsi Zemmour citait les chiffres de la fraude aux assurances sociales dénoncé par Charles Prat. Les "fact-checkers" ont opposé aux chiffres qu'ils prétendent sans fondement - prétextant que c'était parce que Prat était un "ancien" juge - les chiffres "incontestables" de la Cour des Comptes. On trouve exactement cette imbécillité dans l'article de Wikipedia dédié à Charles Prat. Ils se sont attirés la réplique foudroyante de Zemmour. Cependant, on peut estimer que Zemmour a eu tort de déconsidérer publiquement et personnellement la malheureuse animatrice ripolinée qui présentait les conclusions du "fact-checking". Il faut reconnaître que la bêtise "énerve un peu" ...

L'apport du débat pour Mélanchon

En pratique, Mélanchon a peu abordé son programme électoral se bornant à insulter Zemmour et à vanter la bonté de sa propre idéologie gaucho-islamo-ecologiste. Il a surtout tenté de ne pas donner prise à ses "camarades" de le critiquer pour "tendresse excessive" à l'égard de son débatteur. Mais, il a aussi passé deux heures de télévision, ce qui est une chance pour sa campagne.

On peut lui souhaiter d'avoir emporté l'adhésion de ses "camarades" ... Quant aux autres soit 95% de la population française, il est à parier que Mélanchon n'a eu aucun succès. Mélanchon a tenté de "tuer" la candidature de Zemmour. Pour le reste, il est un politicien du passé très lointain. C'est certainement l'apport de son débat "contr" Zemmour.

L'apport du débat pour Zemmour

Zemmour est resté un non-candidat, de sorte qu'on ne peut lui faire les reproches que l'on peut faire à Mélanchon. Mais, même s'il a cité des chiffres concernant le réel, il est surtout resté dans la doctrine ou l'idéologie anti-immigrationiste. Il a démontré avec une certaine réussite le caractère central de ce problème. Mais on peut estimer que sa tactique du "opt-out quand çà arrange la France" sera incapable de résister dans la lutte contre l'immigration aux puissances qui la promeuvent. La volonté de Frexit de Philippot est beaucoup plus efficace. Cependant, on sait bien que le Frexit est une opération qui durerait plusieurs années et c'est trop tard selon Zemmour.

On peut penser que, même si Zemmour a été un peu moins "intellectuel" que dans ses émissions habituelles depuis dix ans, il est resté loin des capacités d'écoute des téléspectateurs. Mais, il est clair que sa mise en cause de l'immigration touche un ressort extrêmement sensible de la population française de sorte qu'il a certainement capté de l'attention. Mais, les français sont inquiets des mesures sanitaires de Macron, du pouvoir d'achat et de l'inflation qui monte, du chômage et de la perte des entreprises françaises. De la dégénerescence du système d'instruction, de l'Université et de la recherche. Zemmour n'a pas abordé ses solutions à ces sujets. Peut être parce qu'il estime que ce ne sont pas les prérogatives du Président de la République ? On notera qu'il n'a été question ni de son livre, ni de la publication "tabloïd" de Paris-Match sur sa baignade de Nice ...

Enfin, on peut penser que son débat lui a permis de tester la "faisabilité" de sa candidature à la présidence de la république. Il tenu face à Mélanchon et face aux journalistes. C'est un pas de plus. Mais a t'il des propositions politiques concrètes et avec qui gouvernera t'il ? Avec qui fera t'il des lois qui vont "bien" ? Avec qui fera t'il appliquer ces "lois qui vont bien" ? Mystères.

Je ne cache pas ma sympathie pour la politique de Zemmour. Mais a t'il une chance de réussir à la présidentielle, puis en tant que Président ? Je crains que non. Même si le désespoir en politique est une sottise.



Revue C-Politix (c) 24 Septembre 2021