Les factieux au Capitole ? La stupidité plutôt.

- 08 Janvier 2021

L'ancien ambassadeur de France à Washington, Gérard Araud, fait très justement remarquer que, hier, au Capitole, quelques milliers de partisans de Trump se sont rassemblés à son invitation pour protester contre la victoire de Biden. Il n'y a là rien de bien étrange. Ce qui suit l'est davantage. Une fraction d'entre eux a pris d'assaut le Capitole et s'y est pavané stupidement pour en repartir à peu près comme ils y étaient entrés. Incapables.

Ils ont joué une saynette. Un acteur de série Z, torse nu et tatoué, déguisé en Bison Agile, s'est dandiné devant le siège du Président du Sénat. La belle affaire ! C'est peut être un blasphème pour la religion démocrate qui prétend pourtant qu'il n'existe pas de blasphème.

Mais Trump aurait dû se souvenir d'une règle de base de la démocratie. On peut se faire élire par des imbéciles. On ne gouverne pas avec eux. Quand à conserver un pouvoir qu'on a perdu, il n'aurait pas fallu y compter, à moins d'avoir eu de l'intelligence pour mille, dix mille, cent mille .... Le compte n'y était pas.

L'Union Soviétique est tombée après une invasion du Parlement de Moscou. L'Ukraine est tombé après une invasion du Parlement de Kiev. La Géorgie était tombée après une invasion du Parlement de Tblissi. A chaque fois, une foule manipulée. A chaque fois, une fraction fanatisée s'empare du bâtiment. Comme à Washington, le 6 janvier 2021. Mais là, c'est juste après qu'il y a quelque chose qui cloche : il n'y a rien. Même pas une victoire de la police du Capitole qui repousse les émeutiers. Ils ont juste abattue une pauvre femme, un peu égarée, un peu excitée. Cà ne coûtait pas cher. Non, les acteurs minables qui jouaient les vedettes d'un film minable tourné sur des iPhones connectés aux réseaux sociaux, leur prestation exécutée, sont rentrés chez eux. Les figurants dépités sont repartis en cars dans leurs campagnes lointaines. C'est tout.

Et le régime, démocrates et républicains fraternellement mêlés dans l'épreuve, mais tremblant de peur rétrospective et surjouant cette peur, a agité les figures réthoriques les plus repoussantes de l'atteinte à la démocratie. C'est vrai. Mais, c'est vraiment surjoué. La démocratie n'est plus qu'un film d'acteurs semi-professionnels, tourné sur smartphone et diffusé sur les réseaux sociaux.

Certains agitent une peur anticipative que cela pourrait être la répétition générale d'un véritable coup d'Etat. Laissons à ces prophètes plus qualifiés que nous le risque d'être déniés par l'Histoire. Pour le journalisme, ils pourront toujours prétendre ce qu'ils craignent ou souhaitent. C'est vrai que, pour activer une étape supplémentaire d'un régime policier, un coup d'état avorté est une occasion en or.

Sans la CIA, Eltsine n'aurait jamais été porté par les émeutiers de Moscou. Sans la CIA, Mikheil Saakachvili n'aurait jamais été porté par les émeutiers de Tblissi. Sans la CIA, jamais Petro Porochenko n'aurait été porté par les émeutiers de Kiev. Alors, à Washington, l'échec des Q-Anon et autres lamentables Proud Boys indique simplement qu'ils ne sont pas agités par la CIA. Il faudrait seulement que les "honnêtes gens" qui s'agitent sous la défaite de Trump arrêtent de fantasmer les grandes gestes de prises de pouvoir par le peuple telles que les racontent les thuriféraires du régime.





Revue C-Politix (c) 4 janvier 2021