Présidentielle. Le grand remplacement vraiment ?

Philippe Brindet - 16 Décembre 2021

La candidature Zemmour à la Présidentielle 2022 a mis en avant une polémique au sujet de l'identité nationale, parfois déclinée en lutte contre le 'Grand Remplacement', ou de 'l'annulation de l'immigration'. La stratégie est puissante qui installe au centre des débats politiques une question centrale, pour plus de deux Français sur trois.

Malheureusement, Zemmour est essentiellement un politologue. Il voit la France comme un objet de réflexion dont il s'exclut lui-même. Mais, il faut reconnaître que, par nature, le chef de l'Etat s'exclut lui-même de la Nation parce qu'il se place face à elle et non pas à l'intérieur d'elle. Et que par nature, le Président de la République de la Cinquième Constitution n'est pas le chef de la Nation. Il est chef de l'Etat ce qui n'est pas la même chose, puisque la Nation est soumise à l'Etat quelque soit le régime démocratique ou monarchique ou tyrannique de l'Etat. Ou les trois ...

En réalité, la chose qui me gêne le plus, c'est que, alors que la "question" zemourienne semble posée avec précision à l'orée du débat, les gens ne l'entendent pas de la même façon. Et chacun y va de son couplet en fonction de ses intérêts ou de ses passions. Souvent les deux. Et il ne ressort rien de bon d'un tel débat. Mais, il faut bien reconnaître que, au bout du débat, la question ne sera pas de savoir si Zemmour a raison ou tort. La question est seulement de savoir s'il est élu ou non. Et sans esprit partisan, de constater si, élu, il parvient à bloquer l'immigration et à bannir les étrangers indésirables, par exemple quand ils ont commis quelque forfait sur le territoire national.

Une réflexion que l'on ne mène pas est de savoir pourquoi et comment en est on arrivé à une Nation menacée, à un Etat omnipotent et impuissant. Pourquoi ? La question exige de sonder la pensée politique des gens qui ont conduit la Nation française à son déclin et l'Etat à son obésité inefficace. Comment ? La question exige d'analyser et donc de dénoncer les déviances d'une classe dirigeante sur laquelle l'Etat n'a aucun pouvoir. Au contraire. Et de dénoncer la corruption d'une classe politicienne entièrement acquise à cette classe dirigeante. Des classes ? Peut être plutôt des "castes" ou même des "clans". Peut être même des "mafias" avec leurs parrains et leurs sicaires.

Je ne brûlerai pas ici mes lumières sur des questions peut être vaines aujourd'hui.

Si j'examine le problème du dirigisme d'une part, et celui de l'Etat et du déclassement de la nation française d'autre part, je constate qu'il fut un temps, gaullien notamment, où le dirigisme était l'affaire de l'Etat. Il était le contrôle du chef de l'Etat sur la vie de la Nation. Je reconnais que le chef de l'Etat, depuis De Gaulle, a perdu beaucoup de sa superbe monarchique même s'il en conserve les ors mais aussi certaines habitudes assez délétères. Non, le dirigisme a échappé à l'Etat et en même temps l'Etat n'a pas su échapper au dirigisme.

Parce que la source du dirigisme s'est peu à peu écartée de Paris, et même de la France, pour rejoindre Washington et New York, Bruxelles et Bonn. Nous sommes tout bonnement retournés à 1944, lors des heures les plus sombres de notre histoire. Nous sommes peu ou prou tiraillés entre l'impérialisme américain et le dynamisme européen de l'Allemagne que les Etats-Unis impériaux ont chargé de régner sur les états de second ordre en Europe. On peut estimer que De Gaulle était parfaitement conscient de ce qui était un danger sous son règne et qui est aujourd'hui une réalité.

Alors, vous savez, la question de l'immigration ...

D'autant que l'immigration n'est pas nécessairement un choix de l'Etat français, même si, son tenancier actuel proteste hautement contre Zemmour (sans le nommer) que "l'immigration est une chance pour la France". Son slogan ignoble n'établit pas que Macron est l'acteur de l'immigration contre laquelle il lutte d'ailleurs bien plus qu'il ne le laisse supposer ...

Non, l'immigration est imposée d'ailleurs que depuis l'Etat français. Un peu à Bruxelles - Bonn, un peu à Washington - New York. A Ankara et Alger, .. Et aussi dans un "écosystème" absolument pollué d'ONGs, salariées par une caste de milliardaires idéologisés qui peuvent se payer la mise en scène de leurs fantasmes socaux les plus débridés. Que l'on considère les ONGs de Soros ou de Gates ...

Nous avons un autre problème : l'effondrement inouï de notre Administration : Enseignement, Culture, Justice, Police. Ces quatre secteurs essentiels de toute Administration d'Etat sont dans une situation de faillite alors que les milliards y coulent à flot :

AdministrationBudget 2020
(en milliards)
Source
Enseignement 76,0Le budget et les finances du système éducatif, Min. Education
Culture3,8Présentation du budget 2021 du ministère de la Culture, Min Culture
Justice8,2Présentation du budget 2021 du ministère de la Justice, Min Justice
Police11,1Budget 2020 - Police Nationale

L'ordre de ces quatre Administrations a été établi de l'Administration la plus défaillante (l'Enseignement) à la moins défaillante (la Police).Je coudrais me concentrer sur la seule Administration de l'Enseignement, dont il ne nous a certainement pas échappé que depuis des lustres, elle ne porte plus ce titre ... Mais quelle que soit la mission qu'elle eçoit de la Nation, il est clair que cette Administration ne permet plus d'assurer l'intégration ou l'assimilation des enfants d'immigrés, parce qu'elle empêche déjà l'intégration au monde économique, social et culturel indistinctement de tous ses élèves. Ou de l'immense majorité d'entre eux. parce qu'elle a failli dans la transmission des savoirs élémentaires : lire, écrire, compter, calculer. Elle a failli ensuite dans la transmission de l'Histoire, de la Géographie, de la Physique, des Sciences Naturelles. Sans parler de l'instruction civique ou des langues et principalement du français. Sans parler des arts et des sports.

Le problème de la première composante du problème français de l'immigration exubérante se trouve là. Et les problèmes de ses trois autres composantes sont peut être moins aigus, mais tout aussi réels.

Si l'Administration est incapable de fournir un enseignement correct, d'offrir un accès à une Culture caractéristique de la France, d'administrer une Justice équitable, et de faire fonctionner une Police bien encadrée, même n'y aurait-il qu'un immigré chaque année à entrer en France, le problème serait le même.


Revue C-Politix (c) 16 Décembre 2021