Une révolte des sachants peut-être

Philippe Brindet - 5 Décembre 2022

La presse bruisse d'une déclaration révoltée d'un ancien Commissaire à l'Energie atomique, l'académicien Yves Bréchet. Ce scientifique, X, Mines, spécialiste de métallurgie, a été interrogé par la commission ad hoc de l'Assemblée Nationale sur le problème énergétique de la France, notamment vis-à-vis de l'électronucléaire, l'un des rares points forts de l'industrie française sur les cinquante dernières années. C'est un effondrement du système auquel nous assistons en quelques années peut-être en moins de dix ans, qui aboutissent à une pénurie d'énergie, ce fondement des temps modernes.

La diatribe de Yves Bréchet a été diffusée par la presse lourde : Marianne le 2 décembre, Le Figaro le 4, ... La vidéo de son audition à l'Assemblée nationale est disponible sur son portail vidéo.

Selon les rapports de presse, Yves Bréchet accuse la classe politique au pouvoir de ne rien comprendre aux sciences et techniques, même à un niveau élémentaire. Pire, il accuse les politiciens de n'y voir aucun intérêt et de prendre en conséquence des décisions politiques parfaitement stupides en termes scientifiques et techniques.

Il y a un deuxième étage à la critique de Yves Bréchet. Il accuse les conseillers des ministres et autres décisionnaires de les flatter de manière courtisane de sorte que ces conseillers aggravent l'incompréhension des politiciens des questions scientifiques et techniques. Le conseiller standard se borne à imaginer quel conseil ferait plaisir à son ministre et de s'y soumettre avec courtisanerie pour favoriser sa propre carrière. Il est naturel qu'un conseiller technique bien en cour soit nommé à la tête d'une entreprise publique. Ou privée, ... on se demande pourquoi, mais c'est comme çà.

Je n'ai pas visionné l'audition de M. Bréchet, ce qui est regrettable, mais me prend trop de temps. Il en résulte que je ne sais pas s'il n'a pas complété sa critique par trois observations que je ferais ici.

L'ignorance scientifique et technique des politiciens est partagée par l'immense majorité des français

La première observation est bien connue depuis des années : le système d'enseignement français est complétement dévalorisé. Seuls quelques individualités parviennent à atteindre un niveau scientifique et technique correct. La raison en est simple : la plupart des français ne savent pas lire et écrire de manière aisée. La réalité est qu'en effet, la plupart d'entre eux ne lisent pratiquement rien d'autre que les rubriques de formulaires administratifs et l'écriture se limite pour eux à cocher les cases de pictogrammes décrivant la situation que le formulaire veut qu'ils choisissent.

Ne sachant ni lire, ni écrire, la plupart des français ne savent bien sûr pas calculer.

Sur une telle base "pédagogique", l'apprentissage des sciences et techniques est absolument impossible et l'ignorance de la classe politique française est parfaitement naturelle. Je dirais qu'on ne peut presque pas la leur reprocher ... Au moins, on ne pourra pas prétendre que la classe politique française ne vient pas du peuple français.

A ce propos, il faut bien noter que le système d'études supérieur français ne fait rien pour arranger les choses. Probablement "conscient" de la faiblesse native des étudiants, les deux systèmes d'études supérieures français ont trouvé des "dérivatifs" à l'apprentissage sérieux des sciences et techniques avec un public largement illettré. Le premier système est celui des universités. Les étudiants sont systématiquement endoctrinés par les fondamentaux du progressisme : wokisme, cancel culture, croyances sur les attraits du "numérique", ... Les rares étudiants qui progressent en sciences reçoivent des bases idéologiques qui leur font rejeter l'apport sociétal des sciences et techniques : environnementalisme, réchauffement climatique, croissance zéro, décroissance heureuse, ... On a vu en 2022 ce rejet par exemple lors de la cérémonie de remise des diplômes à Sup'Agro ...

Le second système d'instruction supérieur est celui dit des grandes écoles. Si une minorité d'étudiants se dirigent vers la recherche dans des coopérations parfois internationales, et là le niveau est souvent très élevé, la plupart des étudiants se vouent à des "occupations" de gestion d'entreprises ou de collectivités publiques, ou encore au management et reçoivent en dépôt les idéologies délétères du mondialisme et du progressisme anti-développement.

Allez, après celà, nourrir une réflexion sur les choix énergétiques de la France ! Le résultat est celui constaté par Yves Bréchet.

Remarque annexe : je donne l'impression qu'il s'agit d'une "catastrophe" franco-française. Il n'en est rien : nous suivons avec 5 à 10 ans de retard ce qui se passe aux USA et presque partout en occident américanisé, parce que les mêmes causes produisent toujours les mêmes effets.

La courtisanerie des uns est renforcée par le lobbyisme idéologique des autres

On a souvent moqué la "monarchie républicaine" en vigueur en France. La monarchie fantasmée semble en effet appeler la courtisanerie. La remarque d'Yves Bréchet est précieuse parce que Yves Bréchet s'est trouvé au plus près de la Cour. Je ne sais pas à quel groupe de conseillers, Yves Bréchet fait allusion en dénonçant leur courtisanerie. Il s'agit certainement de ceux touchant au problème de schoix énergétiques : Industrie, Ecologie, ... Mais la courtisanerie est générale dans l'Administration française, dès lors qu'on se rapproche des décideurs politiques.

Ce que ne note pas Yves Bréchet - du moins, on ne le rapporte pas - c'est que l'inculture scientifique est largement partagée par les courtisans en général - ils n'ont pas de temps à perdre avec des notions inutiles - et les conseillers ministériels et autres en particulier. Issus le plus souvent de l'enseignement supérieur français, beaucoup d'entre eux viennent des formations non scientifiques - anti-scientifiques parfois même - comme Sciences Po', ou droit, magistrature ou administratif. Les idéologies anti-scientifiques et anti-techniques, déjà très développées dans les institutions scientifiques et techniques y atteignent des paroxysmes mortels.

Et il faut y ajouter le lobbyisme des groupes politiques mondialistes, souvent financés par des milliardaires américains, qui développent les pires idéologies anti-scientifiques qui ont jamais apparues en occident. Ils occupent souvent les postes de conseillers et contrôlent souvent les ministres eux-mêmes. De plus en plus, les décideurs en matière industrielle ou scientifique sont des individus ignorants et profondément endoctrinés par les pires idéologies anti-scientifiques.

On cemprend donc que la courtisanerie des uns est aggravée par le lobbyisme des autres. D'autant que ce sont les mêmes ...

Cette ignorance et cette courtisanerie ne se limitent pas aux questions de choix énergétiques

L'absence de culture scientifique minimale chez les politiciens et leurs "conseillers", souvent même parmi les "experts" consultés, ne se limite pas au secteur de l'énergie. Parce que les causes en sont générales : ignorance scientifique et technique, idéologies anti-scientifiques et anti-industrielles, courtisaneries, ...

Les effets pervers des décisions politiques prises sur l'action des conseillers et experts éclatent aux yeux de tous avec la pénurie énergétique. Mais, ces mêmes effets pervers ont été enregistrés dès le départ de la pandémie de SARS-CoV-2, en matière de santé publique. Les mensonges et les erreurs, instillés parmi les décideurs politiques, ont été patents : affaire des masques et équipements de protection, tests PCR mensongers, mesures de distanciation sociale sans aucun fondement scientifique, épidémiologie des origines de SARS-CoV-2 mensongère (l'idéologique zoonose), le scandale des prétendus vaccins à ARNm ou à ADN qui n'étaient ni sûrs, ni efficaces, ... tout celà a été rendu possible par l'ignorance scientique la plus crasse, la courtisanerie la plus éhontée et les manoeuvres idéologiques les plus dangereuses que l'humanité ait connu.

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On sait que la Déclaration des Droits de l'homme confère aux citoyens le droit de demander des comptes à l'autorité publique pour son administration. Ce droit a été réduit à celui de ne plus voter pour le politicien compromis dans un scandale d'administration. Mais même ce droit réduit n'a désormais plus aucune efficacité. Le politicien "sorti", les causes de son échec ne sont pas traitées par son éviction des affaires publiques. Pire, les conseillers sont toujours là. Pire encore, les idéologies anti-scientifiques et anti-industrielles sont toujours là.

Qui les éradiquera ?

Autrement dit, ne plus voter "Macron" ne vous délivrera pas de "Véran", ni de "Pannier-Rumacher". Ni de la myriade de conseillers ignorants et pervers. Ni des idéologies ... Une révolte des sachants peut-être ?




Revue C-Politix (c) 5 Décembre 2022