Ukraine. De l'opération militaire spéciale à la guerre européenne

Philippe Brindet - 10 Octobre 2022

La situation militaire au 10 Octobre 2022

Les actions ukro-otaniennes

Depuis plusieurs semaines, les forces ukro-otaniennes ont lancé deux fortes offensives sur la région de Severodonestxk à l'est de Khakov et sur la région de Kherson au sud de Mikolaëv. S'y ajoutent deux offensives plus faibles sur Zaporijjia et sur Donetsk. Sur Severodonetsk, il semble que les ukro-otanienns aient été stoppés après un recul russe de plus de 80 kilomètres sur un front de 150 kilomètres. Sur Kherson, il y a deux avancées dont l'une de 50 kilomètres de profondeur et de 20 kilomètres au front de rupture.

Mais la grande nouvelle ukro-otanienne est dans le sabotage des gazoducs NordStream 1 et 2 et celui plus récent du pont de Kersh qui relie la péninsule de Crimée à la région russe de Rostov. Ce pont inauguré en 2018 sert à approvisionner la Crimée d'une part et le front sud de Kherson d'autre part. Les sabotages des gazoducs sont destinés à rendre irréversible la coupure des relations de l'Allemagne, affamée de gaz russe, avec la Russie. Il reste cependant un tube de NordStream 2 qui aurait été manqué par les saboteurs et à travers lequel les Russes proposent aux allemands de les approvisionner en gaz.

Les actions russes

Très clairement, à l'initiative du 22 Février (reconnaissance des républiques du Dombass) jusqu'au courant du mois de Septembre 2022, la Russie a depuis perdu l'initiative. Depuis cette date, elle se contente de répliquer aux initiatives destructrices des forces ukro-otanienne avec un temps de retard et souvent un degré moindre. Sauf à Severodonesk et, dans une moindre mesure, à Kherson, la Russie a seulement colmaté les brèches et semble marquer le pas. Elle a - temporairement peut être - renoncé à ses offensives sur Kharkov au Nord et Odessa au sud.

Elle semble cependant préparer une montée en puissance de ses moyens militaires engagés en Ukraine. Elle serait suivie par la Biélorussie qui vient de déployer des troupes à la frontière nord de l'Ukraine. Mais la Russie a décidé :

  • la mobilisation partielle destinée à engager 300.000 soldats formés en Ukraine ;
  • changé de commandant en chez en Ukraine ;
  • lancé un ouragan de missiles et de drones sur tout le territoire ukrainien en réplique aux sabotages ukro-otaniens.

On note que à Kiev, le consulat allemand et la mission européenen ont été frappés.

L'agitation occidentale

L'occident américanisé - une trentaine d'Etats vassaux des Etats-Unis - souffle le chaud sur les braises ukrainiennes. Assurant de leur soutien "moral" le régime de Zelinsky, ces Etats irresponsables sont en fait les victimes des Etats-Unis qui a décidé de les détruire définitivement. Ils se contentent donc de visites d'une bêtise ahurissante et de quelques livraisons d'armes très peu en état de marche et souvent sans munitions. D'ailleurs ces Etats n'ont pas les moyens de donner ni plus ni mieux. La France aurait ainsi "donné" 10 canons de 155 mm à longue portée qui servent aux ukro-otaniens à bombarder les villes du Donbass.

Or, d'un rapport du Sénat de Février 2022, on sait que l'armée française a pour elle-même deux jours d'approvisionnement pour mener une guerre de "haute intensité". Aussi l'aide occidentale, européiste notamment, se borne à des conseils guerriers prodiqués aux ukro-otaniens - qui n'en ont nul besoin - et quelques milliards qui se perdent dans les labyrinthes de la corruption américano-ukrainienne.

Les Etats-Unis livrent un peu plus d'armements dont les lance-missiles à longue portée, Himars, qui servent essentiellement à bombarder le spopulations civiles ratatchées à la Russie. Avec les Allemands et les Anglais, les USA livrent semble t'il beaucoup de renseignement militaire obtenu notamment par les satellites d'observation de l'Otan. Ils ont par ailleurs débloqué des lignes de crédit illimité au régime corrompu de Zelenski et de Biden. Ce dernier est installé en Ukraine depuis 2015, le coup de Maïdan ...

Les inquiétudes hors occident

L'ONU joue à plein le jeu américain en condamanant la moindre initiative des Russes et en faisant silence sur les exactions des ukro-otaniens exécutées sur les populations russes capturées par les offensives. Le rôle de l'ONU est quasi nul dans la recherche d'une solution de pacification de la situation internationale.

Hors l'occident vassalisé des Etats-Unis, des Etats comme la Chine, l'Inde ou la Turquie semblent soutenir la Russie mais déplorent l'escalade de la guerre. Il est probable que leu incertitude se fonde sur la perte d'initiative de la Russie dans sa guerre en Ukraine. Il ne faut jamais hésiter dans ces circonstances. Mais, on peut penser que le coup de Maïdan et le soutien américain à l'Ukraine servent de leçon aux autres Etats. S'ils veulent un futur distinct de la vassalité de l'Allemagne ou de la France, c'est la voie de la Russie qu'ils doivent choisir. On comprend leurs hésitations actuelles, amplifiées par la presse occidentale.

La vague de bombardements russes en représaille des sabotages ukro-otaniens

Le sabotage des gazoducs russes est relativement inattendu. Mais les Ukrainiens avaient annoncé il y a des années qu'ils feraient tout pour détruire le pont de Kersh, sorte de "suymbole" du rattachement de la Crinée à la Russie. Or, Moscou a toujours avert le régime de Prooshenko, puis de Zelinski que des répressailles énormes seraient appliquées par la Russie si l'Ukraine tentait quelque chose contre la sécurité du pont de Kersh. Dans la nuit du 9 au 10 octobre, 24 heures après le sabotage de Kersh, la Russie a lancé un bombardement massif à l'aide de missiles de croisière et de missiles hypersoniques. Selon le parti ukrainien, dans le courant de la journée du 10 octobre le bilan en cours était le suivant :

Jusqu'à présent, des explosions ont été signalées à Kiev, Rovno, Lvov, Ternopol, Ivano-Frankovsk, Khmelnitsky, Zhitomir, Kremenchug, Kropivnitsky, Krivoy-Rog, Odessa, Zaporozhie, Dniepr, Poltava, Kharkov et d'autres petites villes d'Ukraine. Selon la partie ukrainienne, le nombre de frappes est le suivant :

  • 60 dans la région de Kiev ;
  • 20 dans la région de Kharkov ;
  • 47 dans la région de Nikolaïev ;
  • 15 dans la région de Lvov ;
  • 27 dans la région de Vinnytsia;
  • 15 dans la région d'Odessa.

On note donc l'utilisation probable de plus de 200 missiles russes. Il s'agit de l'attaque la plus massive de ce type jamais enregistrée dans l'Histoire, sauf erreur de notre part.Il ne faut pas compter sur la presse occidentale pour avoir un rapport sur l'efficacité de ces frappes. Seulement, on sait que l'électricité, l'Internet et l'eau sont coupés dans plusieurs régions ukrainiennes.

Les conséquences des représailles russes

On peut estimer par avance qu'elles ne seront pas de nature à modifier la politique des Etats-Unis, ni de l'Europe. De ce fait, il est très invraisemblable que ces répresailles, pour autant qu'elles aient réellement affectés les moyens ukrainiens, modifient d'une quelconque façon les intentions des Ukrainiens de reconquérir l'ensemble du Donbass.

A ce sujet, il faut se méfier des rodomontades du régime ukrainien. En réalité, la Russie a franchi seulement un cran de plus dans l'état de guerre avec l'Ukraine.

Une questions se pose : Washington peut il laisser la situation militaire en l'état, c'est-à-dire de se limiter à soutenir matériellement l'Ukraine sans s'engager directement. Avant une confrontation directe, Washington dispose de deux stades plus avancées. Le premier est l'intervention d'un Etat comme la Pologne ou avec les Etats Baltes. Ces Etats sont d'ailleurs, selon des sources diverses, déjà engagées par des troupes "déguisées" en "mercenaires" ou en "légionnaires". Or, le problème d'engager la Pologne, c'est qu'elle a des réclamations territoriales dans l'Ouest ukrainien qui lui appartient depuis le 14° siècle. Comme la Hongrie et la Roumanie ont les mêmes réclamations, avec les Russes à l'Est, il risque de ne pas rester grand chose de l'Ukraine "bidenisée". Mais avec des promesses américaines, Biden peut courir le risque.

Le second stade avant un engagement direct serait celui de l'engagement de l'Otan en prétendant que c'est l'Europe qui est menacée et que l'Otan la défend. Il y aurait indubitablement des troupes américaines. Mais formellement, l'Amérique ne serait pas partie au conflit. Cela signifierait que les troupes américaines seraient "peu" engagées dans le conflit. Or, les "grands" pays de l'Otan qui ne sont pas les USA, se caractérisent par une très grande ... faiblesse militaire. Pire. Il semble que, malgré les attitudes martiales, les Etats vassaux des américains n'aient aucune envie de se lancer dans une aventure militaire, fusse contre les forces armées du ... Vatican. On ne sait jamais avec les aventures ...

Une toute autre solution, c'est que la Russie "comprenne" qu'elle n'aura jamais la "paix" avec le régime de Zelinski et qu'elle décide donc une guerre de destruction massive de l'Ukraine. Or cette éventualité pourrait tout à fait satisfaire Washington. Selon plusieurs analystes, comme Robert Hudson ou John Mersheimer, le but géostratégique des USA est dans un premier temps d'empêcher à tout jamais une coopération de l'Europe avec la Russie, et dans un second temps de ruiner définitivement l'Europe, destinée à servir de zone d'expansion démographique de l'Afrique. Une zone d'expansion entièrement sous le contrôle des Etats-Unis. Dans le premier stade d'une guerre entre "européistes" otanisés ou non, et la Russie serait une affaire inespérée pour les Américains. Le second stade suivra de lui-même ...

La grande erreur des "européens" est de croire que leurs alliés sont par nature leurs "meilleurs amis". Le rêve ...


Revue C-Politix (c) 10 Octobre 2022